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11 novembre 2014 2 11 /11 /novembre /2014 01:42

II Attitudes.

Même si on peut dire que la réflexion manque actuellement d'ordre ou qu'elle n'est pas très systématique, elle existe et l'on ne peut plus écarter l'argumentation avancée par les uns et les autres d'un geste méprisant. Elle témoigne d'un souci nouveau et parfois douloureux. Or l'Eglise-Corps du Christ vit toujours douloureusement son incarnation dans le monde.

N'oublions pas que la question se situe aussi sur un niveau psychologique. Le féminisme en général, d'apparition relativement récente, est un phénomène déstabilisant pour l'être humain, et la question du sacerdoce féminin, qu'on le veuille ou non, s'y insère et y participe. Lorsqu'il s'exprime en termes de "libération de la femme" le féminisme est mal vécu, voire inacceptable, surtout pour la femme orthodoxe qui souvent n'en a tout simplement pas besoin. Le plus souvent elle peut remplir une vocation de femme de prêtre ou être chef de choeur ou laïque active et consciente de son appartenance à l'église, sans chercher une autre forme de pouvoir défini.

Le problème du sacerdoce féminin est souvent vécu de façon douloureuse parmi les Orthodoxes qui actuellement s'affrontent avec violence, ou en sous-main, sur le travail oecuménique. C'est le cas notamment de tout un secteur de l'église russe, intégriste, fermé, anti-occidental, où l'on va jusqu'à dénoncer l'oecuménisme comme une forme d'hérésie moderne et le COE comme une sorte de supra-église syncrétiste et ouverte à tous les compromis. Or ce sont les contacts avec les églises soeurs qui posent le problème de l'ordination des femmes à la prêtrise. Donc, hors l'oecuménisme, on pourrait l'ignorer ou s'en passer. Mais ce qui est nouveau, c'est que la situation s'est inversée et sous l'influence d'un oecuménisme bien compris, ce sont désormais les Orthodoxes qui sont amenés à justifier le fait que l'on n'ordonne pas les femmes dans l'orthodoxie. Ajoutons que le clergé orthodoxe étant marié, la femme occupe dans le "couple ministériel" une place réservée et ancestrale. La matouchka russe, la presbytera grecque sont d'un grand appui pour le prêtre, dans ses tâches pastorales notamment. Rappelons que le prêtre s'est marié avant d'être ordonné et que c'est souvent une vocation commune qui s'exprime lors de son ordination .Pour ce qui est de la société russe, il faut reconnaître que dans son histoire, elle a été et demeure antinomiquement patriarcale et matriarcale à la fois.

Nombreuses sont les familles où les femmes (épouses, grand mères ou grandes surs) jouissent de pouvoirs occultes qu'elles préfèrent ne pas expliciter. Peut-être cet aspect du caractère national explique l'indifférence de certaines femmes russes au problème du sacerdoce féminin. Mais d'autre part, surtout dans les cas nombreux de conversion à l'âge adulte, l'on observe chez les couples un désir de restaurer la dignité de l'homme russe et d'instituer des rapports d'amour et de respect mutuel total.

Dans certains milieux russes particulièrement conscients et avertis on observe un retour vers les valeurs historiques et traditionnelles orthodoxes. Ce retour n'est malheureusement pas dénué d'un danger de fondamentalisme qui s'exprime dans certaines "communautés de base" ou "confréries" nouvelles à vocations caritatives. Certaines n'admettent toujours pas qu'un quelconque pouvoir de décision ou d'organisation puisse être détenu par des femmes. Des prêtres et évêques continuent à appuyer leur autorité sacerdotale sur le pouvoir qu'elle leur confère sur les fidèles en général (et les sous-fidèles que sont souvent les femmes à leurs yeux). Dans des coins assez reculés de Russie en revanche, on observe des situations inverses: le besoin étant très pressant, des femmes sont parfois investies de pouvoir didactiques et pastoraux et pas seulement de tâches caritatives

Les attitudes sont très variables dans la diaspora d'Europe occidentale, selon les paroisses et les réactions des prêtres et évêques et des fidèles. La question de "l'impureté féminine" semble être reléguée aux oubliettes, puisque ici ou là, lors de baptêmes, on fait entrer la nouvelle baptisée dans le sanctuaire, même parfois si elle est adulte. Ce n'est qu'un détail, mais on sait le rôle que jouent les rites dans la pratique religieuse intime de chacun.

Dans d'autres paroisses, sans être conservateur ni même intégriste, l'évêque est tout simplement irréfléchi dans toutes ses démarches : parmi ses paroissiens les "dignitaires" sont tous des hommes, ce sont eux les "décideurs", tandis que les femmes servent le café et font le ménage.

L'attitude des fidèle aussi est très peu homogène.

Dans les paroisses de France, notamment, il y a beaucoup de fidèles récemment convertis à l'Orthodoxie. Pour eux les traditions et rites orthodoxes se confondent souvent avec la Tradition. Ils ne savent pas, par manque d'expérience, discerner le détail de l'essentiel. L'apprentissage est long et ils ne voient souvent dans la Tradition que le rituel dont ils se pénètrent avec vénération. En néophites, ils ne peuvent entendre ce que signifie la phrase de Vladimir Lossky "la tradition représente l'esprit critique de l'Eglise" (11). L'oecuménisme ne les intéresse généralement pas ou seulement comme source d'instruction et de culture, et les défis de la division entre les chrétiens ne peuvent que rarement les troubler ou leur faire mal : qu'ils viennent d'un monde de non-croyants ou d'une autre confession, l'Orthodoxie leur apporte tout.

Ces quelques exemples ainsi que les divers textes de théologiens cités plus haut témoignent du fait que dans l'orthodoxie, la femme est assez généralement honorée et respectée. Les positions de prétendue supériorité et de pouvoir masculins semblent peu à peu perdre de leur actualité et l'on peut espérer que les quelques évêques évoqués plus haut sont d'affligeantes exceptions. Ce qui signifierait que le refus orthodoxe d'ordonner des femmes à la prêtrise ne serait plus lié à une idée d'infériorité de la femme. Ceci est, semble-t-il, un grand pas vers une évacuation de l'aspect psychologique et aussi vers une clarification du problème.

 

 

 


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Published by Monastère Orthodoxe de l'Annonciation - dans Catéchèse

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