Cependant, ce harcèlement d'une acuité extrême, même lorsque l'un de ceux qui vivent selon le monde s'emporte sans raison contre nous, nous inquiète et nous tourmente très vivement, à l'idée que nous sommes devenus un scandale pour l'un de ceux qui parlent le langage du monde. De là vient que notre esprit se trouve incapable de se livrer à la contemplation.

En effet, comme la parole de la science relève totalement de la charité, elle empêche notre esprit de se dilater assez pour concevoir les contemplations divines, tant que nous n'avons pas regagné, dans la charité, celui qui s'est emporté sans raison contre nous. Si ce dernier s'y refuse, ou s'il s'est éloigné pour éviter de nous rencontrer, la science nous presse d'adjoindre à notre disposition intérieure les traits de son visage, dans une sorte de large effusion de notre âme, pour accomplir ainsi, dans le fond du cœur, le précepte de la charité. Il faut, dit l'Ecriture, que même les visages de ceux qui se sont emportés à tort soient accueillis sans colère dans l'esprit de ceux qui veulent avoir la science de Dieu. Si on y parvient, non seulement l'esprit se tournera sans trébucher vers la théologie, mais encore il jouira d'une grande assurance pour s'élever vers l'amour de Dieu, en se hâtant de passer sans encombre du second au premier degré.

Saint Diadoque de Photicé : Les propos ascétiques. Cent chapitres.