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24 janvier 2011 1 24 /01 /janvier /2011 06:37
par Job Getcha, dimanche 23 janvier 2011, 20:00

Nos Églises chrétiennes viennent de célébrer les fêtes de la Manifestation du Seigneur. De sa naissance, comme petit enfant, à Bethléem de Judée, nous avons été transportés à travers le temps et l’espace vers son baptême par Jean dans le désert du Jourdain alors qu’Il s’apprêtait à commencer Sa mission publique à l’âge de trente ans. En effet, alors que l’Église orthodoxe a célébré le 6 janvier la fête de la Théophanie, dite aussi fête du baptême du Christ ou de l’Illumination, l’Église catholique romaine vient elle aussi de célébrer la fête du baptême le premier dimanche après l’Épiphanie, fête qui clôt le temps de Noël par la manifestation du Seigneur au Jourdain. C’est à ce dernier événement que se rapportent les lectures que nous venons d’entendre aujourd’hui.

 

Par ces commémorations liturgiques, l’Église nous rappelle que, comme l’avait prophétisé Isaïe, grâce à la manifestation de notre Seigneur et Sauveur Jésus-Christ, « le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ; sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi » (Is 9,1). Comme le clame le Psalmiste, notre Seigneur est vraiment notre lumière et notre salut (Ps 26,1). Il est, comme l’enseigne le saint apôtre et évangéliste Jean le Théologien, « la lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde » (Jn 1, 9), et c’est de cette lumière que nous avons tous été illuminés lors de notre saint baptême.

 

Il convient cependant de distinguer le baptême de Jean du baptême que nous confère le Christ dans l’Église. Le baptême de Jean était un rite pénitentiel qui préparait le peuple qui accourait vers lui au Jourdain à la venue du Messie et à l’avènement du Royaume de Dieu. « Repentez-vous, car le Royaume de Dieu est tout proche » (Mt 3,2) clamait le Précurseur à ceux qui venaient vers lui. Et au sujet de notre Sauveur, il ajoutait : « Il vient après moi, celui qui est plus fort que moi… Moi je vous ai baptisé avec de l’eau, mais lui vous baptisera avec l’Esprit Saint » (Mc 1,7-8).

 

Il est normal de se demander pourquoi le Christ, lui le Dieu fait homme, est venu demander le baptême de Jean. Le Baptiste s’en étonnait lui-même. « C’est moi, disait-il, qui ai besoin d’être baptisé par toi, et c’est toi qui viens vers moi ! » (Mt 3, 14). Mais le Christ lui donne la réponse : « Laisse faire à présent, ainsi convient-il que nous accomplissions toute justice » (Mt 3, 15). Les fêtes de la manifestation de Dieu que nous venons de revivre nous rappellent sans cesse que le Fils de Dieu est devenu fils de l’homme pour que les fils des hommes deviennent fils de Dieu. En assumant la nature humaine déchue, le Fils de Dieu a pris sur lui, en tant que véritable Agneau de Dieu, tous les péchés des hommes, et c’est en récapitulant l’humanité entière qu’il accoure vers Jean pour être baptisé dans le Jourdain afin de sanctifier la nature humaine et la création tout entière à travers son œuvre de salut qu’Il s’apprête à accomplir. Comme nous l’enseigne l’épître aux Hébreux, « Il devait se faire en tout semblable à ses frères, afin de devenir un grand prêtre miséricordieux et fidèle dans le service de Dieu, pour expier les péchés du monde » (Hb 2,17). Ainsi, en acceptant la condition humaine, Dieu s’est abaissé, il a pris la condition d’esclave, c’est-à-dire de l’humanité soumise au joug de la mort et du péché, et c’étant ainsi fait homme, étant devenu pleinement l’un de nous, Il a accepté de s’humilier jusqu’à la mort sur la croix (cf. Ph 2, 7).

 

C’est pourquoi, alors que se clôt liturgiquement ce temps de Noël, nous nous préparons à entrer dans le temps du Carême qui va nous mener vers la fête centrale de l’année liturgique qu’est la fête de Pâques. Or, c’est précisément dans le mystère pascal que s’enracine notre baptême en tant qu’actualisation de la mort et de la Résurrection du Christ. Car dans le baptême, conformément à l’enseignement de l’apôtre Paul, nous tous qui avons été baptisés en Christ, nous avons revêtu le Christ (Ga 3,27).

 

Cependant, notre baptême en Christ qui devrait nous mener tous vers l’unité s’avère être, hélas, une cause de division entre nous. La lecture de l’épître d’aujourd’hui nous rassure peut-être quelque peu en rappelant qu’il en est ainsi depuis pratiquement la naissance de l’Église. En effet, saint Paul dit avoir entendu parlé de disputes au sein des Chrétiens de Corinthe, les uns se clamant de Paul, les autres d’Apollos, d’autres de Pierre, d’autres encore du Christ… Néanmoins, si l’apôtre Paul était des nôtres aujourd’hui, il dirait que les uns se disent orthodoxes, les autres catholiques, d’autres encore protestants… les uns se clamant du pape, d’autres de Luther, d’autres de Calvin, d’autres encore des Pères de l’Église… C’est pourquoi l’exhortation de Paul résonne encore aujourd’hui en nos cœurs avec autant de vigueur tout en conservant son actualité et sa fraîcheur : « Le Christ est-il donc divisé ? Est-ce donc Paul qui a été crucifié pour vous ? Est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisés ? » (1 Co 1,13).

 

En cette semaine de prière pour l’unité des Chrétiens, il serait de bon ton de s’interroger sur le sens que chacun de nous, en tant que Chrétien, donne à son baptême. Le baptême est-il pour nous un signe de division ou un appel vers l’unité en Christ ? Certes, nous ne pouvons pas ignorer les causes qui nous séparent depuis plusieurs siècles, voire même un millénaire, ni les résoudre du jour au lendemain. Néanmoins, prendre conscience que par notre baptême nous avons été incorporés au Christ nous permettra peut-être de les surmonter et d’aller au-delà. Pour cela, nous devons nous rappeler les paroles de l’apôtre Paul nous disant que « le Christ ne l’a pas envoyé pour baptiser, mais pour annoncer l’Évangile, et sans avoir recours à la sagesse du langage humain, ce qui viderait de son sens la croix du Christ » (1 Co 1,17).

 

Le baptême doit avoir inauguré en nous et nous avoir communiqué une véritable vie en Christ, une vie centrée sur l’Évangile, une vie conforme aux préceptes évangéliques. On retrouve ici l’un des enseignement fondamentaux de Nicolas Cabasilas, un théologien byzantin remarquable du 14e siècle, auteur d’un très beau traité intitulé La vie en Christ, où il affirme : « Le devoir qui est commun, comme leur appellation même, à tous ceux qui sont appelés du nom du Christ, […] c’est de ne pas entrer en guerre contre la volonté du Christ, mais conformer sa vie à ce qu’il lui plaît en observant ses préceptes de toutes les façons… […] Les commandements du Sauveur étant ainsi des obligations communes à tous les fidèles, ils sont réalisables pour ceux qui le veulent, ils font partie des nécessités impérieuses et sans lesquelles il n’est pas possible de s’unir au Christ… ».

 

Cette vie en Christ que nous sommes tous appelés à mener par notre baptême doit conformément à l’esprit de l’Évangile être ancrée dans la charité. Il n’est donc pas surprenant que Cabasilas conclut son traité en disant que : « Si la vie est la vertu qui meut les vivants, qu’est-ce qui meut les hommes vraiment vivants dont le dieu est le Dieu non des morts mais des vivants ? […] Qu’est-ce donc qui mériterait, plus que la charité, le nom de vie ? […] Car lorsque tout le reste, dans le monde futur, aura disparu, […] la charité qui seule demeure suffira pour cette vie dans le Christ… ».

 

C’est donc dans cet esprit d’amour évangélique que nous tous qui avons été baptisés en Christ et qui de ce fait avons revêtu le Christ devons mener notre vie, indépendamment de nos appartenances confessionnelles, et indépendamment d’avec qui nous avons à faire. Et c’est à cet amour que le monde nous reconnaîtra en tant que véritables disciples du Christ, conformément à son enseignement : « A ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l’amour entre vous » (Jn 13,35).

 

En cette semaine de prière pour l’unité des Chrétiens, efforçons-nous donc de discerner quelle place occupe le Christ dans notre vie depuis notre baptême. Examinons notre vie et vérifions si elle est vraiment une vie en Christ, une vie conforme à l’Évangile et à ses préceptes. Car ce n’est qu’en nous déclarant vraiment du Christ, et non d’autres personnages qui, bien qu’étant exemplaires et dignes de respect, demeurent secondaires par rapport à Lui, notre seule Lumière et notre unique Sauveur, que nous arriverons à dépasser nos divisions et trouver l’unité. Attachons-nous au Christ seul en pratiquant ses commandements afin de trouver en Lui cette unité tant désirée et qui doit être modelée sur l’unité trinitaire. Apprenons à voir en chaque Chrétien, en chacun qui s’appelle du nom du Christ, un christophore, un porteur du Christ de par son baptême, et par dessus tout, reconnaissons chaque être humain, indifféremment de sa race, de son sexe, de ses origines ethniques ou de ses convictions religieuses, comme créé à l’image de Dieu. C’est en pratiquant ainsi la charité que nous nous clamerons comme vraiment du Christ et que le monde nous reconnaîtra en vérité comme ses disciples. Qu’en cela nous aide la Trinité une, sainte, consubstantielle et indivisible, le Père, et le Fils, et le Saint-Esprit, au nom de qui nous avons été baptisés, et à qui revient honneur, louange et adoration dans les siècles des siècles. Amen.

 

 

Paris, Couvent Saint-Jacques, dimanche 23 janvier 2011

 

Archimandrite Dr. Job Getcha

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Published by Monastère Orthodoxe de l'Annonciation - dans Actualités

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